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Film
Identification
TitreL'Enfant du secret
Réalisateur(s)
Date2006
Film / TéléfilmFiction télévision
Représentation
CatégorieXVIIIe
EpoqueXVIIIe
Générique technique
Scénario

Patrick Laurent, Alicia Alonso

Longueur / Durée du film1h40'
CouleurCouleur
Bande-son / Languefrançais
Société de production

Expand Drame/ RTBF/ Fontana

Pays de productionBelgique
Équipe technique

photographie : Bruno Privat
décors : Bruno Champenois
costumes : Monic Parelle

Générique artistique
Acteur(s)
Réception et documentation
Disponibilité dans le commerce

diffusé sur RTBF le 17 novembre 2006; sur France 2 le 23 janvier 2007.

Autres références bibliographiques

Francis Cornu, "L'Enfant du secret", Le Monde TV, 21 janvier 2007, p. 11

Résumé et commentaire critique
Résumé et commentaire critique

L'histoire est celle du jeune Guillaume de Solar, sourd et muet abandonné en forêt par sa mère en 1774 et recueilli par l'abbé de l'Epée. L'affaire se conclut par un procès retentissant (voir plus loin).
Les hasards de l'actualité ont voulu que ce téléfilm fût montré à la télévision française le lendemain de la mort de l'abbé Pierre, juste avant un documentaire sur le fondateur d'Emmaüs. Justement, l'abbé de l'Epée est ici présenté comme une autre "personnalité préférée des Français": soutane énergique, visage douloureux, divine patience avec les uns ("Tes oreilles sont une porte fermée, nous entrerons par la fenêtre"), sainte colère envers les autres ("Vous répondrez de vos actes devant un tribunal. Ne comptez pas sur la charité chrétienne : elle a aussi ses limites").
L'action pédagogique de "l'instituteur gratuit des sourds et muets" est réduite à deux scènes (il ne s'agissait pas de refaire L'Enfant sauvage); le film insiste plus sur les préjugés auxquels se heurtent les jeunes sourds. Mais le contexte idéologique est terriblement simplifié. L'abbé n'est aidé que par sa soeur; le reste du monde se compose d'aristocrates inévitablement ridicules et vains même quand ils sont bien intentionnés et d'adversaires caricaturaux (lieutenant de police borné, avocat détestable, intendant sinistre). Seule la comtesse est habitée par un conflit intérieur, mais son sacrifice final (elle se prostitue à un sergent recruteur pour racheter l'enrôlement de son fils) apparaît aussi inutile qu'improbable.
Le film a été tourné avec un louable souci d'authenticité, avec de vrais sourds-muets (dont l'interprète du rôle de Jospeph/Guillaume), mais il ne parle pas de la façon dont l'abbé a élaboré sa méthode; ni des limites de celle-ci et de ses différences avec la langue des signes actuellement en vigueur (il paraît cependant qu'un "coach" s'est occupé de rechercher les signes utilisés à l'époque par l'abbé). Le film néglige aussi les conditions sociales et économiques ("nous ne prenons jamais d'argent, votre soutien nous suffit") dans lesquelles l'abbé dirige sa petite communauté de la rue des Moulins; et le sort que l'histoire peut réserver au comte de Solar après la scène de réconciliation finale trop attendue et qui ne résout rien.
En mai 1779, dans le n°38 de ses Annales politiques, civiles et littéraires, («Réclamation d’Etat en faveur d’un sourd et muet», p. 353-392), Simon Linguet éclaire minutieusement l'affaire Solar. Il reproduit d'abord la notice publiée par l’abbé de l’Epée dans tous les papiers publics (évidemment sans le portrait-robot dessiné, tout à fait anachronique, que l’on voit dans le film):
«Du premier mars 1776.
Le 2 septembre 1773 on a trouvé sur le grand chemin de Péronne, par Compiègne, proche Séchelles, un jeune enfant sourd et muet, âgé d’environ douze à treize ans. On l’a conduit à Paris et mis à l’Hôpital Général avec l’indication ci-dessus; il a été mené ensuite à l’Hôtel-Dieu pour cause de maladie, et y est resté pour servir selon ses forces dans une des salles.
Etant parvenu maintenant à l’âge de quinze ans, il s’exprime d’une manière assez sensible pour faire entendre :
1°.Qu’il est d’une famille honnête et aisée.
2° Que son père, qui était boîteux, est mort.
3°.Que sa mère est restée veuve avec quatre enfants, savoir trois filles et lui.
4°.Que ladite mère portait des rubans, avait une montre, de beaux habits. […]»
Sur la foi de nombreux témoignages suscités par cet avis et après bien des hésitations, l’abbé se décida «à commettre le sort de son pupille au hasard d’un procès» devant le Parlement de Paris, procès qui n’était toujours pas terminé en 1779. Mme de Solar étant morte, il ne s’agissait pas, comme dans le film, d’obtenir qu’elle reconnût son fils, mais de rétablir le présumé comte de Solar dans ses droits et de poursuivre son supposé ravisseur, Cazaux.
Linguet ne cache pas son admiration pour l’abbé de l’Epée ni sa sympathie pour la cause qu’il défend. Evaluant le nombre des sourds et muets du Royaume à environ 3000 et ceux de la classe d’âge de l’enfant trouvé à 200, il juge très improbable qu’on ait affaire à une imposture du type de celle de Martin Guerre: «un sourd et muet est déjà une production bien rare : ne serait-ce pas un véritable prodige que deux sourds et muets du même âge, copiés l’un sur l’autre?»
Cependant il refuse de « s’attendrir » et insiste sur les erreurs de l’instruction et sur le caractère non conclusif des preuves apportées par l’accusation. Les témoignages de l’enfant lors de l'audience ne peuvent être retenus ni pour lui ni contre lui:
«Il n’a pas encore fait de grands progrès dans l’art pénible qui doit développer son âme, et remplacer trois sens par un seul. On est forcé, quand on veut lier conversation avec lui, de prendre pour médiateur un de ses camarades d’infortune, dont l’éducation est plus avancée : cet interprète, encore voisin d’un état dont il sort, reçoit les questions, les transmet dans son idiôme visuel au jeune plaideur, dont il recueille et transporte les réponses, tantôt par écrit, tantôt par les hiéroglyphes pittoresques convenues dans l’école de l’Abbé de l’Epée. C’est ainsi que les dépositions de l’aspirant Solar, et ses confrontations ont été reçues par les Juges. Or quelles inductions peut-on tirer contre lui de ses incertitudes, et même de ses méprises?». (L’abbé de l’Epée ne pouvait lui-même «servir de langue à l’enfant», car on craignait qu’il ne lui prêtât des idées.)
Nous sommes donc loin de la communication heureuse et facile que le film suppose.
Linguet conclut en suggérant que même si l’enfant trouvé n’était pas le jeune comte de Solar, la charité, l’humanité et les intérêts de la société gagneraient à ce qu’il fût reconnu tel. Il est peut-être dommage que le film n’ait pas retenu cette proposition lucide et généreuse.
[Denis Reynaud]

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Éditeurs : Delphine Gleizes et Denis Reynaud [UMR IHRIM]

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