Les parties de trictrac (https://www.youtube.com/watch?v=zXKBNGpFCUo) :
— Le jeu est simple. Enfin, je veux dire moyennement compliqué. Voici quinze dames.
— C’est beaucoup.
— Ah, ah ! farceur. Vous prenez les noires, et moi les blanches. Alors…
Sous le regard amusé de Mme de Mortsauf, le comte m’expliqua patiemment les règles du jeu.
— Ah ! cinq et as. Alors il y a deux solutions. Ou vous mettez une dame, seule, sur l’as, là. Non, non, non, celle-ci. Vous confondez toujours vos dames et les miennes. Vous comprenez ?
— Ma foi, non.
— C’est un peu difficile au début, mais enfin… Continuons. Blanche vous avez raison. Félix est un garçon charmant. Votre dame…
Quand plus tard nous jouâmes de l’argent, ses gains lui causèrent des joies constantes, mesquines, déshonorantes. À ce métier mon argent s’en alla et, sans argent, adieu les soirées. J’avais écrit à ma mère de m’en envoyer. Ma mère me gronda et ne m’en donna pas pour huit jours. En cette extrémité, je découvris dans la bibliothèque de M. de Chessel un traité de trictrac et l’étudiais. En peu de jours je fus en état de dompter mon maître, mais quand je le gagnais, son humeur devint exécrable.
— Ah, il n’y a pas à dire, vous avez fait des progrès. Six et cinq. Peste soient les dés ! Juste la combinaison que je ne devais pas faire. Oui, vous gagnez surtout sur les fins de partie. Reconnaissez que c’est parce que je perds mes moyens. Non, non, Monsieur, non, dame touchée, dame jouée.
— Comme il vous plaira
— Par la mort du diable, vous avez un main d’enfer. Voilà ma dame battue à faux, à présent. Je ne voulais pas jouer. Non je ne voulais pas jouer. Voilà : six et cinq de nouveau. J’ai perdu. Je vous dis que j’ai perdu. Je vous dois, je vous dois six louis. Prenez- les, Monsieur. Vous ne serez jamais un fin joueur ; mais, vous avez une de ces chances. J’ai le crâne dans un étau. Qu’avez-vous donc à me regarder comme ça. J’en ai assez du trictrac.
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